La vie d’un laboratoire de recherche résulte du dynamisme de l’action en cours ; elle se nourrit de sa culture et de son histoire. Pour comprendre la véritable nature de l’ICMCB, son organisation, son approche de la science moderne, il faut faire un retour de presque soixante ans en arrière.
En 1961, Paul Hagenmuller était nommé Professeur titulaire de la Chaire de Chimie Minérale de la Faculté des Sciences de Bordeaux. En arrivant avec une quinzaine de chercheurs et techniciens, il ouvrit la chimie minérale à la physique et ainsi créa la Chimie du Solide qui, en quelques années prit une place prépondérante au niveau national et international.
Synthétiser de nouveaux matériaux, déterminer leur structure, étudier leurs propriétés physiques et, par itérations successives, moduler les propriétés pour comprendre et aussitôt essayer d’en découvrir de nouvelles tout en recherchant leurs applications, sont alors devenues les préoccupations quotidiennes des chercheurs.
Voilà l’impulsion qu’a donnée Paul Hagenmuller à cette équipe qui, devenue le Laboratoire de Chimie Structurale puis Laboratoire de Chimie du Solide du CNRS, allait s’ouvrir sur le monde et sur l’industrie tout en acquérant une notoriété internationalement reconnue en recherche fondamentale.
Pour que cette démarche puisse conduire à un tel rayonnement, il fallait un leader, mais aussi une équipe avec une ambition commune et une organisation qui permette à chacun de s’épanouir en recevant des autres tout en donnant beaucoup : une présentation peut-être idéalisée, mais effectivement proche de la réalité. Cette organisation, qui se pérennise depuis 60 ans, est basée sur des équipes, autonomes mais pas indépendantes, et des services collectifs qui jouent un rôle de liant dans le laboratoire en associant efficacité et réactivité.
En 1986, en prenant la direction du Laboratoire, Jean Etourneau avait devant lui un énorme challenge : préserver l’héritage et impulser une nouvelle dynamique. Ses maitres mots : ouverture et pluridisciplinarité, alliés à une énergie et une volonté exceptionnelles, allaient conduire, en intégrant deux nouvelles équipes » Sciences Moléculaires » et « Fluides Supercritiques », à la création en 1995 de l’Institut de Chimie de la Matière Condensée de Bordeaux. Simultanément, la Chimie du Solide s’ouvrait à la Science des Matériaux en considérant les problèmes de mise en forme, d’interface, de la transition du macro au nano… c’est-à-dire le passage du matériau idéal au matériau réel.
Dès lors, l’échelle de l’Institut et les collaborations classiques avec de nombreux laboratoires ne permettaient plus de résoudre les nouveaux problèmes fondamentaux et ceux posés par la société : il fallait structurer la recherche au niveau local, national et international. C’est à cette mission que Jean Etourneau puis Claude Delmas de 2004 à 2012 se sont attachés.
Soixante ans après l’initiative de Paul Hagenmuller, que de progrès réalisés ; mais que de choses encore à inventer et à concrétiser pour l’ensemble des membres de l’Institut.
Du fondamental pour découvrir et comprendre, mais aussi du fondamental pour contribuer à résoudre les problèmes de la société, du plus complexe au plus humble ; Voilà notre mission.